CALENDRIER, s. m. (Hist. & Astron.) c’est une distribution de temps accommodée aux usages de la vie ; ou bien c’est une table ou almanach qui contient l’ordre des jours, des semaines, des mois, des fêtes, etc. qui arrivent pendant le cours de l’année.
Il a été appellé calendrier, du mot calendæ, que l’on écrivoit anciennement en gros caracteres au commencement de chaque mois.
Le calendrier Romain, qui est encore en usage, doit son origine à Romulus : mais depuis il a subi différentes réformes. Ce législateur distribua le temps en différentes périodes, pour l’usage du peuple qui vivait sous son gouvernement : mais comme il était beaucoup plus versé dans la guerre que dans les matières astronomiques, il ne divisa l’année qu’en dix mois, qui étaient alternativement de trente-un et de trente jours : elle commençait le premier de Mars ; et Romulus croyait qu’au moyen de cette distribution l’année recommençait toujours au printemps ; s’imaginant que le soleil parcourait toutes les saisons dans l’espace de trois cents quatre jours ; au lieu qu’en effet il s’en fallait soixante-un jours que cette année ne s’accordât avec la vraie année solaire.
Le calendrier de Romulus fut réformé par Numa, qui y ajouta deux mois de plus, Janvier et Février, qu’il plaça avant le mois de Mars : de plus Numa ordonna que le mois de Janvier aurait vingt-neuf jours, Février vingt-huit, et les autres mois alternativement trente-un et vingt-neuf, excepté Août et Septembre, qui en avoient vingt-neuf chacun ; de manière que l’année de Numa consistait en trois cents cinquante-cinq jours, et commençait au premier de Janvier : il s’en fallait dix jours par an, et quarante-un jours au bout de quatre ans, que cette année ne s’accordât avec le cours du soleil ; et l’année Greque lunaire qui était de trois cents cinquante-quatre jours, donnait en quatre ans quarante-cinq jours d’erreur. Cependant Numa, à l’imitation des Grecs, aima mieux faire une intercalation de quarante-cinq jours, qu’il divisa en deux parties, intercalant un mois de vingt-deux jours à la fin de chaque deuxième année, et à la fin de deux autres années suivantes un autre mois de vingt-trois jours. Il appela ce mois ainsi interposé, le Macédonien ou le Février intercalaire.
On ne fut pas longtemps sans apercevoir du défaut de cette intercalation, et on y ordonna une réforme.
Mais cette réforme étant mal observée par les pontifes auxquels Numa en confia le soin, occasionna de grands désordres dans la constitution de l’année.
César, en qualité de souverain pontife, tâcha d’y remédier : dans cette vue il s’adressa à Sosigenes, célèbre astronome de son temps : cet astronome trouva que la distribution du temps dans le calendrier ne pourrait jamais être établie sur un pied bien sûr, sans avoir auparavant observé avec beaucoup de soin le cours annuel du soleil : et comme le cours annuel du soleil ne s’achève qu’en trois cents soixante-cinq jours six heures, il réduisit l’année à ce même nombre de jours. L’année de cette correction du calendrier fut une année de confusion ; car on fut obligé, afin d’absorber l’erreur de soixante-sept jours dans laquelle on était tombé, et qui était cause de la confusion, d’ajouter deux mois outre le Macédonien, qui se trouvait avoir lieu dans cette même année ; de manière qu’elle fut composée de quinze mois, ou de quatre cents quarante-cinq jours. Cette réformation se fit l’an de Rome 708, quarante-deux ou quarante-trois ans avant J. C.
Le calendrier Romain, que l’on appelle aussi calendrier Julien, du nom de Jule Cesar son réformateur, est disposé en périodes de quatre années ; les trois premières années, qu’on appelle communes, ont trois cents soixante-cinq jours ; et la quatrième, nommée bissextile, en a trois cents soixante-six, à cause des six heures qui dans l’espace de quatre ans composent un jour. Il s’en faut à la vérité quelque chose ; en effet, après un espace de cent trente-quatre ans, il faut retrancher un jour intercalaire. Ce fut pour cette raison que le pape Grégoire XIII. suivant les conseils de Clavius et de Ciaconius, ordonna que la centième année de chaque siècle ne serait point bissextile, excepté celle de chaque quatrième siècle ; c’est-à-dire, que l’on ferait une soustraction de trois jours bissextiles dans l’espace de quatre siècles, à cause des onze minutes qui manquent dans les six heures dont la bissextile est composée.
La réformation du calendrier, ou le nouveau style, ainsi qu’on l’appelle en Angleterre, commença le quatrième Octobre 1582, où l’on retrancha tout-d’un-coup dix jours qui, faute d’avoir tenu compte des onze minutes, s’étaient introduits dans le comput depuis le concile de Nicée en 325 ; ce concile avait fixé l’équinoxe paschal au 21 de Mars.
Le calendrier Julien des Chrétiens est celui dans lequel les jours de la semaine sont déterminés par les lettres A, B, C, D, E, F, G, au moyen du cycle solaire ; et les nouvelles et pleines lunes, particulièrement la pleine lune de Pâque, avec la fête de Pâque et les autres fêtes mobiles qui en dépendent, par celui des nombres d’or, disposés comme il faut dans tout l’espace de l’année Julienne.
On suppose dans ce calendrier que l’équinoxe de printemps est fixé au vingt-unième de Mars , et que le cycle de dix-neuf ans, ou les nombres d’or, indiquent constamment les lieux des nouvelles et pleines lunes : cependant l’une et l’autre de ces suppositions est erronée. Aussi cette erreur fit naître une fort grande irrégularité dans le temps de la Pâque.
Pour démontrer cette erreur d’une manière plus évidente, appliquons cette méthode de comput à l’année 1715, où l’équinoxe du printemps tombait au 10 de Mars, suivant le vieux style, et au 21 suivant le nouveau : la vraie pleine lune d’après l’équinoxe tombait au 7 d’Avril ; ainsi c’était trois jours trop tard par rapport au cycle lunaire ou nombre d’or, qui donnait cette année la pleine lune paschale le 10 d’Avril : or le 10 d’Avril se trouvant un dimanche, la Pâque doit être remise au 17 suivant la règle ; ainsi la Pâque qui devrait être le dixième d’Avril, ne serait que le dix-septième. L’erreur consiste ici dans la post-position de la pleine lune ; ce qui vient du défaut du cycle lunaire : si la pleine lune eût tombé le onzième de Mars, Pâque aurait tombé le treizième du même mois ; ainsi l’erreur qui vient de l’anticipation de l’équinoxe, aurait excessivement augmenté celle qui procède de la post-position.
Ces erreurs étaient si multipliées par la succession du temps, que Pâque n’avait plus aucune régularité dans le calendrier. Ainsi le pape Grégoire XIII. en 1582 retrancha dix jours du mois d’Octobre, pour rétablir l’équinoxe dans sa vraie place, c’est-à-dire, au vingt-unième de Mars. Il introduisit de cette manière la forme de l’année Grégorienne, ordonnant que l’on prendrait toujours l’équinoxe au vingt-unième Mars. Ce pape déclara qu’on n’indiquerait plus les nouvelles et pleines lunes par les nombres d’or, mais par les épactes. Cependant on suit encore aujourd’hui (en 1749) l’ancien calendrier en Angleterre sans cette correction ; et c’est ce qui cause une différence de onze jours entre le comput des Anglais et celui de la plupart des autres nations de l’Europe.
Le calendrier Grégorien est donc celui qui détermine les nouvelles et pleines lunes, le temps de la Pâque, avec les fêtes mobiles qui en dépendent dans l’année Grégorienne, par le moyen des épactes disposées dans les différents mois de l’année.
C’est pourquoi le calendrier Grégorien est différent du calendrier Julien ; 1°. par la forme de l’année ; 2°. par les épactes qui ont été substituées au lieu des nombres d’or : quant à leur usage et à leur disposition.
Quoique le calendrier Grégorien soit préférable au calendrier Julien, il n’est pas cependant sans défaut : peut-être n’est-il pas possible, ainsi que le conjecturent Cassini et Tycho-Brahé, de porter ce comput à une justesse qui ne laisse rien à désirer ; car premièrement l’intercalation Grégorienne n’empêche pas que l’équinoxe n’arrive après le vingt-unième de Mars ; ce n’est quelquefois que le vingt-troisième ; et quelquefois l’équinoxe anticipe, en tombant le dix-neuvième ; et la pleine lune qui tombe le vingtième de Mars, est alors la vraie lune paschale : néanmoins dans le calendrier Grégorien on ne la compte pas pour telle. D’un autre côté, dans ce calendrier on prend pour la lune paschale la pleine lune du vingt-deuxième de Mars, qui cependant n’est point paschale lorsqu’elle tombe avant l’équinoxe : ainsi dans chacun de ces deux cas le calendrier Grégorien induit en erreur. De plus le comput par épactes étant fondé sur les lunes moyennes, qui peuvent néanmoins précéder ou suivre les vraies lunes de quelques heures, la pleine lune de Pâque peut tomber un samedi, lorsque l’épacte la met au dimanche ; et au contraire l’épacte peut mettre au samedi la pleine lune qui est le dimanche : d’où il suit que dans le premier cas la Pâque est célébrée huit jours plus tard qu’elle ne le doit être ; dans le second cas elle est célébrée le vrai jour de la pleine lune, avec les Juifs et les hérétiques quarto-décimans, condamnés pour de bonnes raisons par le concile de Nicée ; ce qui est, dit M. Wolf, un inconvénient fort à craindre. Scaliger fait voir d’autres défauts dans le calendrier Grégorien : c’est ce calendrier que suivent les Catholiques Romains, et même la plûpart des Protestans.
Le calendrier réformé ou corrigé, est celui où sans s’embarrasser de tout l’appareil des nombres d’or, des épactes, des lettres dominicales, on détermine l’équinoxe, avec la pleine lune de Pâque et les fêtes mobiles qui en dépendent, par les calculs astronomiques, suivant les tables Rudolphines.
Ce calendrier fut introduit dans les états Protestants d’Allemagne l’an 1700, où l’on retrancha tout-d’un-coup onze jours du mois de Février ; de manière qu’en 1700 Février n’eut que dix-huit jours : par ce moyen le style corrigé revint à celui du calendrier Grégorien. Les Protestants d’Allemagne ont ainsi reçû pour un certain temps la forme de l’année Grégorienne, jusqu’à ce que la quantité réelle de l’année tropique étant enfin déterminée par observation, d’une manière plus exacte, les Catholiques Romains puissent convenir avec eux d’une forme plus exacte et plus commode.
Construction d’un calendrier ou d’un almanach. 1°. Calculez le lieu de la lune et du soleil pour chaque jour de l’année ; ou bien prenez-les dans les éphémérides. 2°. Trouvez la lettre dominicale, et par son moyen divisez le calendrier en semaines. 3°. Calculez le temps de la Pâque, & déterminez par-là les autres fêtes mobiles. 4°. Ecrivez aux jours marqués les fêtes immobiles, avec les noms des saints qu’on y célèbre. 5°. Marquez à chaque jour le lieu du soleil et de la lune, avec leur lever & leur coucher ; la longueur du jour et de la nuit ; le crépuscule et les aspects des planètes. 6°. Mettez aux endroits qui conviennent les principales phases de la lune. Mettez-y aussi l’entrée du soleil dans les points cardinaux, c’est-à-dire, dans les solstices et dans les équinoxes, avec le lever et le coucher des planètes, particulièrement leur lever et leur coucher héliaque, et ceux des principales étoiles fixes. On trouvera les méthodes pour ces différents calculs aux articles qui leur sont particuliers.
La durée des crépuscules, c’est-à-dire, la fin de l’après-midi et le commencement du matin, avec le lever et le coucher du soleil, et la longueur des jours ; tout cela peut être transporté des calendriers d’une année dans ceux d’une autre, la différence étant trop petite dans chaque année pour être de quelque considération dans l’usage civil.
Ainsi la construction d’un calendrier n’a rien en soi de fort difficile, pourvu que l’on ait sous la main des tables des mouvements célestes.
Le calendrier Gélaléen est une correction du calendrier Persan : elle fut faite par l’ordre du sultan Gélaleddan, la 467e année de l’hégire, et de J. C. 1089. La correction du calendrier ordonnée par ce sultan est telle, qu’elle donne fort exactement la grandeur de l’année.
Dans le calendrier des Juifs il y a un cycle de 19 années commençant à une nouvelle lune que les Juifs feignent être arrivée un an avant la création ; cette nouvelle lune est appelée par eux molad tohu ; et dans le cycle de 19 années, qui sont des années lunaires, la 3e, la 6e, la 8e, la 11e, la 14e, la 17e, & la 19e, sont des années embolismiques de 383 jours 21 heures ; les autres sont des années communes de 354 jours, 8 heures.
Dans le calendrier des Mahométans, il y a un cycle de 30 années, dans lequel les années 2, 5, 7, 10, 13, 15, 18, 21, 24, 26, 29, sont embolismiques ou de 355 jours ; les autres communes ou de 354 jours.
Selon les Juifs, l’année de la création du monde est la 959e de la période Julienne, commençant au 7e d’Octobre ; & comme l’année de la naissance de J. C. est la 4714e de la période Julienne, il s’ensuit que J. C. est né l’an 3761 de l’ère des Juifs ; c’est pourquoi si on ajoute 3761 à une année quelconque de l’ère chrétienne, on aura l’année Juive correspondante, qui doit commencer en automne ; bien entendu qu’on regarde alors l’année Juive comme une année solaire, et elle peut être regardée comme telle en effet, à cause des années embolismiques qui remettent à peu près de trois en trois ans le commencement de l’année Juive avec celui de l’année solaire.
L’ère des Mahométans commence à l’an 622 de J. C. qui est l’année de l’hégire ; d’où il s’ensuit que si d’une année quelconque de l’ère chrétienne on ôte 621, le reste sera le nombre des années de J. C. écoulées depuis le commencement de l’ère Mahométane. Or l’année Julienne est de 365 jours 6 heures, et les années de l’hégire, qui sont des années lunaires, sont de 354 jours 8 heures 48′ ; d’où il s’ensuit que chaque année de l’hégire anticipe sur l’année Julienne de 10 jours 21 heures 12′ ; et par conséquent 33 ans, de 359 jours 3 heures 36′, c’est-à-dire d’une année, plus 4 jours 18 heures 48′ ; donc si on divise par 33 le nombre trouvé des années Juliennes écoulées depuis l’ere Mahométane, et qu’on ajoûte le quotient à ce nombre d’années, on aura le nombre des années Mahométanes.
Il faut remarquer que le surplus des 4 jours 18 heures 48′, doit former aussi une année au bout de plusieurs siècles, c’est-à-dire au bout d’environ 72 fois 33 ans ; mais cette correction ne regardera que nos descendants. Wolf, Elem. de chronologie.
On se sert aussi du mot calendrier pour désigner le catalogue ou les fastes que l’on gardait anciennement dans chaque église, et où étaient les saints que l’on y honorait en général ou en particulier, avec les évêques de cette église, les martyrs, etc.
Il ne faut pas confondre les calendriers avec les martyrologes ; car chaque église avait son calendrier particulier ; au lieu que les martyrologes regardent toute l’Eglise en général : ils contiennent les martyrs et les confesseurs de toutes les églises. De tous les différents calendriers on en a formé un seul martyrologe ; en sorte que les martyrologes sont postérieurs aux calendriers.
Il y a encore quelques-uns de ces calendriers qui existent, particulièrement un de l’église de Rome fort ancien, qui fut fait vers le milieu du quatrième siecle, il contenait les fêtes des païens comme celles des chrétiens ; ces dernières étaient alors en assez petit nombre. Le père Mabillon a fait imprimer aussi le calendrier de l’église de Carthage, qui fut fait vers l’an 483. Le calendrier de l’église d’Ethiopie, et celui des Cophtes, publiés par Ludolphe, paraissent avoir été faits après l’année 760. Le calendrier des Syriens imprimé par Genebrard, est fort imparfait ; celui des Moscovites, publié par le père Papebrock, convient pour la plus grande partie avec celui des Grecs, publié par Genebrard. Le calendrier mis au jour par dom Dachery, sous le titre d’année solaire, ne diffère en rien du calendrier de l’église d’Arras. Le calendrier que Beckius publia à Augsbourg en 1687, est selon toute apparence, celui de l’ancienne église d’Augsbourg, ou plutôt de Strasbourg, qui fut écrit vers la fin du dixième siecle. Le calendrier Mosarabique, dont on fait encore usage dans les cinq églises de Tolede ; le calendrier Ambrosien de Milan, et ceux d’Angleterre, avant la réformation, ne contiennent rien que l’on ne trouve dans ceux des autres églises occidentales, c’est-à-dire, les saints que l’on honore dans toutes ces églises en général, et les saints particuliers aux églises qui faisaient usage de ces calendriers. Chambers.
Calendrier perpétuel. On appelle ainsi une suite de calendriers relatifs aux différents jours où la fête de Pâque peut tomber ; et comme cette fête n’arrive jamais plus tard que le 25 Avril, ni plutôt que le 22 Mars, le calendrier perpétuel est composé d’autant de calendriers particuliers, qu’il y a de jours depuis le 22 Mars inclusivement, jusqu’au 25 Avril inclusivement ; ce qui fait 35 calendriers.
On trouve un calendrier perpétuel fort utile et fort bien entendu, dans l’excellent ouvrage de l’Art de vérifier les dates, par des religieux Bénédictins de la congrégation de S. Maur.
Calendrier Rustique, est le nom qu’on donne à un calendrier propre pour les gens de la campagne, dans lequel ils apprennent les temps où il faut semer, planter, tailler la vigne, etc. Ces sortes de calendriers sont ordinairement remplis de beaucoup de règles fausses, & fondées la plupart sur les influences et les aspects de la lune et des planètes. C’est pourquoi il est bon de distinguer avec soin les règles qui sont fondées sur des expériences exactes et réitérées, d’avec celles qui n’ont que le préjugé pour principe. (O)